La crampe du musicien

La crampe du musicien

Questions / Réponses pour comprendre la crampe musicien, élaborées à partir de l’Extrait du «Botulien » n°2  (Décembre 1999) et des écrits de Philippe Chamagne, Kinésithérapeute à Paris.

Qu’est-ce que c’est ?

Il s’agit d’une dystonie portant le plus souvent sur une fonction très précise, nécessitant un mouvement fin et répété.
Les dystonies de fonction, ou crampes des musiciens sont des affections qui touchent tous les styles de musique. Elles représentent selon des statistiques réalisées dans des orchestres américains environ 10 % des problèmes rencontrés chez les musiciens.
La spécificité du geste musical réside dans son aspect ultra-technique auquel on parvient par un travail prolongé, répétitif et qui commence souvent dés l’enfance.

Quels symptômes ?

Elle est difficile à diagnostiquer car la plainte est souvent exprimée en termes de technique musicale (difficulté à faire des trilles, un vibrato, un tempo…), qui doit être mise en rapport avec le niveau antérieur du musicien et nécessite une grande connaissance de la musique. Chez les musiciens, c’est principalement la main et le poignet qui sont le plus souvent touchés, mais on rencontre également des localisations faciales avec perturbation de la motricité et de la commande au niveau des lèvres de la langue, des joues ou du larynx chez les instrumentistes à vent. La plainte la plus fréquente réside dans une perte de la commande d’un ou plusieurs doigts toujours dans le même aspect technique du jeu.
Il est également évoqué une absence de vitesse, de fluidité du geste comme si les doigts devenaient autonomes de la pensée. L’auto-correction est impossible et augmente même le trouble.

Existe-t-il un facteur déclenchant ?

Le facteur déclenchant le plus fréquent est un changement dans la technique et surtout dans la durée du jeu (préparation d’un concours, répétition d’un spectacle). Un changement d’instrument, un traumatisme physique ou psychologique sont également cités comme facteurs déclenchants. Pour le professeur Jean Decourt, « la répétition indéfinie d’un geste complexe dans des conditions non physiologiques, un surmenage musculaire et nerveux, l’acharnement des sujets à surmonter des problèmes de haute technicité peuvent aboutir à des attitudes vicieuses, à une dysharmonie des groupes musculaires agonistes et antagonistes, et à des troubles de la sensibilité proprioceptive dont dépend l’organisation fonctionnelle du geste ».

Qui en souffre ?

Les résultats d’une étude australienne portant sur des musiciens d’orchestre, ont montré que cette pathologie était fréquente (40 à 60 % des musiciens après 10 ans d’activité). Les femmes semblent moins souvent touchées, mais à un âge plus précoce. La majorité (75 %) des patients étudiés jouaient d’un instrument à corde.

Comment la diagnostiquer ?

Sur le plan médical, il faut éliminer les autres atteintes neurologiques (SEP.), et surtout le syndrome de surmenage, qui est une pathologie inflammatoire musculaire, articulaire ou tendineuse due aux mouvements répétitifs, et dont le symptôme caractéristique est la douleur. L’examen des musiciens dystoniques consiste à faire pratiquer des exercices de difficultés croissantes, jusqu’à la « mise en échec ». Cependant, le trouble est parfois très discret et nécessite un examen très minutieux, nécessitant un enregistrement vidéo. Parfois, le problème n’est décelable qu’à l’oreille.

Est-ce une maladie douloureuse ou handicapante ?

La crampe du musicien est une affection très grave sur le plan social et professionnel, touchant aussi bien les amateurs que les professionnels. Certains patients, très angoissés par la rupture dans leur vie professionnelle, que représente la dystonie de fonction, pourront bénéficier de l’aide du psychologue.

Quels sont les traitements ?

Le traitement de la crampe du musicien est essentiellement basé sur le réapprentissage de la technique instrumentale et une bonne hygiène de vie. La kinésithérapie doit être douce et ciblée. Le recours aux injections de toxine botulique est peu fréquent, car il est difficile de prendre le risque de provoquer une gêne supérieure au trouble initial.
Au total, la prise en charge de la dystonie de fonction est de longue durée dans l’état actuel de nos connaissances.
Elle associe neurologues, rééducateurs, psychologues aux professeurs d’instruments, aux luthiers, l’abord multidisciplinaire semblant être une des clefs de l’amélioration de ces « faiseurs d’émotions » que sont les musiciens.

En quoi consiste la rééducation ?

La rééducation, selon le protocole proposé par Philippe Chamagne, est précédée d’un bilan postural rigoureux. Une attention toute particulière est portée sur les régions des épaules, du membre supérieur et de la main. Le comportement dynamique de l’omoplate dans le porté du bras sur l’instrument ainsi que le maintien de la voûte métacarpienne au niveau de la main est étudié avec soin. Le traitement comporte les aspects suivants :

  • Phase 1 : travail proprioceptif et postural global. Rééquilibration des chaînes musculaires de l’ensemble du corps.
  • Phase 2 : travail comportemental dans le geste physiologique de la ceinture scapulaire, du membre supérieur et de la main.
  • Phase 3 : remodelage musculaire avec corrections des déséquilibres des muscles agonistes et antagonistes.
  • Phase 4 : rééducation à l’instrument, éducation d’une gestion a minima des engagements musculaires.

A ce programme rééducatif, il est souhaitable d’associer des techniques de relaxation et de sophrologie

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